Quatre vertus cardinales étaient reconnues autrefois : La Justice, La Force, La Tempérance et La Prudence. A celles-ci les chrétiens ajoutent La Foi, L'Espérance et La Charité. Ces sept vertus figurent sur le Minchiate avec certains changements dans les numéros d'ordre par rapport au Tarot de Marseille qui, pour sa part, ne conserve que La Justice, La Force et La Tempérance.
Ces images viennent en droite ligne de l'iconographie chrétienne médiévale et, dans l'ensemble, les différents tarots proposent des allégories très semblables - même si certaines figures sont debout et d'autres assises.
L'imagerie des cathédrales présente souvent le thème de la pesée des âmes ; celui qui tient alors le glaive et la balance est saint Michel. Le passage du saint à l'allégorie féminine de La Justice semble relativement tardif. Est-ce cette double origine qui se trouve figurée dans l'image du Tarot des Visconti qui montre un cavalier dans la partie haute? C'est une hypothèse.
A noter que les attributs - glaive et balance - expriment les deux manières dont on peut, selon Aristote, envisager La Justice ; celle-ci pouvant être distributive ou équilibrée.
Mais le symbolisme n'est pas seulement chrétien ou grec. Le thème de la pesée des âmes est présent en Égypte. En ce sens, Court de Gébelin et ses successeurs n'ont pas tort de se référer à cette civilisation. A partir du moment où les sujets sont considérés dans une grande généralité, il est naturel d'en retrouver des résonances à des époques et dans des univers différents. Dans le Tarot de Marseille, La Justice occupe la huitième place. Le chiffre 8 manifeste l'équilibre, et cette situation paraît aller de soi. Pour diverses raisons et principalement parce qu'ils ont voulu faire coïncider l'ordre du Tarot avec celui des signes du Zodiaque, Macgregor Mathers décida de lui affecter le nombre XI en l'intervertissant avec La Force. Waite, Crowley et d'autres occultistes ont suivi cette pratique, mais Wirth conserve néanmoins le numéro VIII, comme Pitois et Falconnier qui sont restés fidèles à la notion d'équilibre.
Pitois identifie cette lame à Thémis. C'était l'ancienne déesse grecque de la Justice et des bons conseils, mais elle était aussi l'interprète de la volonté des dieux et avait le don de donner des oracles. Quoi qu'il en soit, la figure manifeste l'équilibre entre la grâce, la douceur et la rigueur. Comme le dit Van Rijnberk, « la femme assise représente la douceur de la Grâce, l'épée tenue toute droite indique la rigueur de la loi ; enfin la balance nous fait comprendre que la vraie justice doit être fondée sur le juste équilibre entre les deux ». A cet égard, la représentation donnée par le Tarot des Visconti apporte la meilleure des illustrations ; la rigueur et la Grâce se retrouvent non seulement dans les attributs et le visage de La Justice, mais aussi à travers l'union, dans le même tableau, de la femme calmement assise et du cavalier vengeur.